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Un blog de Faux-Folles

Un blog de Faux-Folles

Si tu n'aimes pas faire les boutiques, mais que tu n'as jamais rien à te mettre, Si tu n'envisages pas une société sans hommes, mais que tu ne supportes pas les machos et les misogynes Si tu es de celles qui réfléchissent trop pour être de celles qui sont belles , Si tu existes aussi par toi même, et pas (que) au travers de tes enfants, Si tu es un mec, mais que tu es plus féministe que la majorité des femmes, Alors partageons ensemble nos "Faut-pas" de Faux-folles..


Une enseignante en colère

Publié par fauxfolles sur 9 Janvier 2014, 20:02pm

Catégories : #Témoignages

 

Le 07 janvier 2014, le Figaro publié une interview d’Antoine Compagnon, professeur de littérature française au Col­lège de France, est notamment l'auteur d"'Un été avec Montaigne". Pour lui, le déclassement social des enseignants est lié à la massification de l'enseignement.*

 

« La féminisation massive de ce métier a achevé de le déclasser, c'est d'ailleurs ce qui est en train de se passer pour la magistrature. C'est inéluctable. Un métier ­féminin reste encore souvent un emploi d'appoint dans un couple. L'enseignement est choisi par les femmes en raison de la souplesse de l'emploi du temps et des nombreuses vacances qui leur permettent de bien s'occuper de leurs enfants. »

 

Une enseignante a décidé de réagir à cet article pour Faux-Folles :

 

 

Faux-Folles : Quel est votre parcours professionnel ?

 

Je suis enseignante depuis 8 ans en établissement privé catholique (mais rémunérée par l'état). J'ai connu uniquement deux écoles: une à La Courneuve avec beaucoup d'enfants non francophones et j'enseigne depuis cette année dans le Xxème arrondissement de Paris dans un milieu plutôt « bobo ».

J'ai passé mon concours en 2004, l'ai eu du premier coup, ai effectué mon année de professeur stagiaire puis affectée dans le 93 pour mon premier poste à l'âge de 23 ans.

 

 

Faux-Folles : Quelle est votre situation personnelle ?

 

Quand j'ai débuté ma formation d'enseignante, j'étais en couple, amoureuse même si je me doutais que je ne finirais pas ma vie avec. Au début de ma carrière professionnelle, j'étais célibataire et vivais en coloc avec mon frère avant de vivre seule dans un studio...et oui une enseignante à Paris touche le même salaire qu'en province à peu de choses près: nous avons une indemnité de résidence de 60 euros à savoir un dixième d'un loyer parisien de 25 m2 dans le XVIIIème arrondissement parisien à l'époque où je me suis installée seule.

J'ai ensuite vécu en couple avec la chance de pouvoir bénéficier d'un loyer réduit car les parents de mon conjoint étaient les propriétaires de notre logement. Mon conjoint qui est par la suite devenu mon mari était également enseignant avant de changer quatre fois consécutivement d'emploi. J'ai donc assuré la charge du foyer pendant ces périodes où il a aussi connu le chômage.

Je me suis séparée l'an dernier et avec mon salaire d'enseignante je n'ai pu me louer qu'une chambre de 9m2 à 420 euros. Je me suis vue refusée des logements même en gagnant 3 fois le montant du loyer et en profitant de la sécurité de l'emploi des enseignants.

Je suis de nouveau en couple aujourd'hui et je vis avec mon nouveau conjoint.

J'envisage d'avoir un enfant d'ici un an et demi.

 

 

Faux-Folles : Pour quelles raisons faites-vous  ce métier ?

 

J'ai un profil littéraire autant dire que ce n'est absolument pas vendeur sur le marché de l'emploi... Les postes dans les métiers de l'édition sont chèrs et changer de voie ne m'intéressait pas. Des amies autour de moi passaient le concours alors pourquoi pas... D'autre part d'une nature peu confiante l'idée de ne pas avoir à passer d'entretien pour décrocher un job me convenait... La sécurité de l'emploi m'a parut aussi être un point non négligeable.

Les vacances??? Ce serait mentir de dire que ça n'entre pas en ligne de compte mais il faut savoir que les salaires des enseignants sont calculés sur une base de 10 mois annualisés sur 12... Certes c'est chouette d'avoir des vacances mais vu notre salaire il ne faut pas croire que les voyages sont de rigueur à chaque vacances scolaires...

 

 

Faux-Folles : Etes-vous d’accord avec les propos de Mr Compagnon ?

 

Il est fréquent que les enseignantes soient des épouses ou des compagnes d'ingénieur dans le milieu dans lequel je travaille mais il ne faut pas non plus tomber dans le cliché. Beaucoup de filles de ma promo ont débuté en étant célibataire ou vivant seules dans des studios ou des chambres de bonnes.

De même, les propos tenus réduisent la femme à être dépendante de son mari. Je pense toutefois que les hommes ne voient pas tous d'un mauvais oeil d'avoir une compagne avec un salaire plus élevé que le leurs, les mentalités ont changé mais les faits dans notre société ne sont pas visibles.

Bref en gros si tu veux être instit faut que tu sois maquée sinon tu vas en chier? Assez réducteur comme vision des choses!

Par ailleurs, un Bac+5 pour un job d'appoint...euh comment dire... F*** O**!!!

 

Faux-Folles : Qu’aimeriez-vous lui répondre ?

 

Tout d'abord pourquoi ce métier s'est féminisé? Sans vouloir me plaindre il me semble que la question salariale est de rigueur. Beaucoup d'hommes se tourneraient vers l'enseignement si les salaires étaient corrects à mon avis. Certains songent que c'est aux femmes de s'occuper des enfants donc que c'est naturel que la majorité des enseignants soient des enseignantes. Pour avoir eu des collègues hommes je peux vous assurer qu'ils en sont tout aussi capables que nous.

La souplesse de l'emploi du temps? Ahah ! De mon point de vue il est plus facile de prendre une journée pour enfant malade dans une entreprise que dans une école. En effet, une enseignante est seule dans sa classe (sauf en maternelle où il y a des assistantes maternelles)... Une absence ça veut dire laisser 30 marmots en plein, surcharger les classes des collègues qui les récupèrent et d'autres désagrèments... De même, il ne faut pas oublier la charge de travail qu'un enseignant peut avoir à la maison...ou bien est-ce moi qui suis trop consciencieuse...

Le temps pour bien s'occuper de ses enfants? Je pense malheureusement (et cela m'a été confirmé par des collègues mamans) qu'une enseignante passe plus de temps à s'occuper de ses élèves que de ses propres enfants... Ca veut tout dire!

J'aimerai finir par une anecdote arrivée à une de mes amies instit. Enceinte, elle va à la crèche de son arrondissement déposer un dossier pour son futur enfant. Reçue par la directrice de la crèche, elle s'en voit refuser l'accès parce que je cite « elle est instit' donc a le temps de s'en occuper »... Je pense que ce genre de réaction est à méditer....

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